Cet exposé explorera le traitement de l’information sensorielle chez des pratiquants expérimentés de la pleine conscience, en l’évaluant par l’habituation au sursaut. Le sursaut (mesuré en utilisant l’électromyographie appliquée à l’amplitude d’un clignement d’œil consécutif à un bruit fort et soudain) est un réflexe câblé, et il est usuellement ressenti comme désagréable. En règle générale, l’amplitude du sursaut s’atténue vite par l’habitude, lorsque les stimuli qui le provoquent se succèdent rapidement. Cependant, les méditants expérimentés en phase de pratique intensive manifestent une habituation atténuée au sursaut durant les périodes de vigilance ouverte, car ils maintiennent l’ouverture et la fraîcheur d’attention à chaque stimulus entrant, malgré son caractère désagréable. Il est intéressant de noter que les théories du traitement de l’information sensorielle considèrent la réduction du filtrage sensoriel comme préjudiciable au traitement efficace de l’information, et comme susceptible de conduire à la fragmentation cognitive et à un effondrement fonctionnel analogue à celui qu’on observe dans la schizophrénie. Pourtant, on a montré que l’entraînement à la pleine conscience est associé à un traitement cognitif plus efficace, à une réduction des pathologies psychiques, à une régulation accrue des émotions, et à un bien-être global.
Je présenterai de nouvelles données psychophysiologiques sur l’habituation au sursaut chez des méditants expérimentés de base dans la tradition bouddhiste tibétaine pratiquant le Dzogchen, et j’explorerai des mécanismes pouvant sous-tendre une capacité accrue de traitement de l’information en présence d’une réduction du filtrage informationnel durant l’attention pleinement consciente.